Sous la surface turquoise du lagon, la vie bat son plein tout au long de l'année. À l'approche de Noël, certains habitants familiers semblent particulièrement appropriés : de petites spirales colorées émergeant du corail comme des décorations vivantes. Ce sont des « Eu'a au », mieux connus sous le nom de vers-arbres de Noël.
Bien plus petits que les sapins que l’on installe dans nos salons, mais tout aussi resplendissants, ces minuscules merveilles marines illuminent les récifs de Teti’aroa de leurs formes spiralées et de leurs couleurs éclatantes.
Des sapins multicolores sous la mer
Rouge, jaune, bleu, orange, blanc ou parfois multicolores…
Le ver-arbre de Noël (Spirobranchus giganteus) se décline dans une palette digne d’un marché de Noël tropical qui garde encore une part de mystère : si certaines teintes semblent liées à la protection ou à la reproduction, les raisons précises de cette diversité chromatique demeurent inconnues.
Ses deux spirales, formées de tentacules délicats, servent à filtrer le plancton dont il se nourrit. Au moindre mouvement trop proche, il disparaît instantanément dans son tube calcaire, refermant l’entrée avec un petit opercule rond orné de deux “cornes” caractéristiques. Seules ses spirales visibles trahissent sa présence : son corps, lui, reste caché profondément dans le corail. Ses larves, minuscules et translucides, dérivent d’abord au gré des courants parmi le zooplancton, avant de se fixer sur un corail pour y passer toute leur vie.
Une espèce bien installée dans les récifs de Teti’aroa
Le ver-arbre de Noël compte deux sous-espèces :
- Spirobranchus giganteus giganteus, présent dans les Caraïbes
- Spirobranchus giganteus corniculatus, présent dans l’Indo-Pacifique, dont Teti'aroa
Il fait partie des habitants les plus remarquables des récifs tropicaux : un ver tubicole capable de vivre plus de 40 ans, sans jamais quitter son tube.
S’il se fixe principalement sur les coraux vivants, il peut aussi s’installer sur des éponges, des ascidies ou même des coquilles de bivalves.
Une symbiose étonnante entre le ver et le corail
En s’enfouissant dans les structures calcaires du corail, le ver-arbre de Noël crée une relation étonnante :
- Le corail lui offre un abri solide et durable.
- Le ver protège le corail, malgré lui, grâce au mouvement continuel de ses spirales.
Cette agitation repousse notamment la redoutable étoile de mer Acanthaster planci, qui évite les polypes entourés des panaches vibrants du ver.
Ces mouvements améliorent également la circulation de l’eau autour du corail, apportant davantage de nutriments aux polypes.
Mais lorsque les vers deviennent trop nombreux, ils peuvent fragiliser les colonies coralliennes déjà stressées, un rappel du délicat équilibre des récifs.
Un rôle écologique essentiel
Lorsqu’un ver-arbre de Noël meurt après plusieurs décennies, il laisse derrière lui une cavité profonde dans le corail. Ces petites “maisons abandonnées” deviennent alors des refuges précieux pour d’autres espèces, comme certaines blennies.
Ainsi, même après sa disparition, il continue de soutenir la biodiversité du récif.
Ici, même les arbres de Noël brillent sous la mer.
Photos: Theo Guillaume